Texte : Raymond Blanchard, agent de recherche et projets
Photo : Marc-Samuel Larocque, agent de communication
En toute candeur, j’admet que revendiquer des études plus abordables pour la jeunesse francophone de notre province est par moments une entreprise décourageante. Si on choisit de mesurer les succès d’après les résultats obtenus, je vous pardonnerais d’avoir l’impression qu’on travaille pour pas grand chose, bien souvent.
Regardez la situation présente: après avoir mis sur pied une énième campagne visant à informer le public général (et au premier chef, la population étudiante) sur l’impact à long terme du coût des études, on se retrouve dans la même position, à annoncer que rien n’est susceptible de changer. (FÉÉCUM) Pour dire plus juste, changer pour le pire reste tout de même une possibilité.
Quand je dis que c’est décourageant.
Sauf que si on se borne à quantifier la valeur du travail accompli aux résultats qui en découlent de façon directe, nul besoin de vous expliquer que ce serait vite fini, les revendications. On se laisserait docilement marcher sur le corps sans résistance, au nom d’une petite vie tranquille.
Au fond, qui se presserait à lacer ses patins si la partie est perdue d’avance?
Pourquoi revendiquer, alors? C’est à la fois simple à dire et complexe à expliquer, mais pour l’essentiel, vous connaissez l’adage:
« Donner un pouce, c’est perdre un pied. »
C’est un peu là qu’on en est dans la situation présente. On entend les mêmes discours que le reste de la province, en l’occurrence qu’on manque de fonds et que des « décisions difficiles » pourront s’imposer à court terme si rien ne change. (Radio-Canada) Chiffres à l’appui, vous connaissez la chanson: l’avenir est sombre, la population vieillit trop vite, et par-dessus le marché, notre système d’éducation « est un désastre » (Acadie Nouvelle) qui ne permet pas à nos jeunes « de réussir leur vie et de pouvoir rivaliser sur les marchés du travail de l’avenir ». (GNB)
Alors comment ça pourrait aller, sauf mal?
Il y a de quoi abattre un séquoia dans le poids de ces paroles sombres, portées qui plus est par des personnes en position non seulement d’autorité, mais d’action pour redresser cette situation, ma foi, terrifiante.
Posons le postulat inverse: ce ne sont pas des « choix difficiles » qui sont proposés, mais au contraire des décisions faciles - pour peu qu’il n’y ait pas de résistance à leur mise en effet.
Quand le gouvernement a annoncé qu’il comptait fermer les urgence la nuit dans 6 hôpitaux régionaux, avant de reculer face à l’indignation populaire, on a justifié la décision en disant - pour l’essentiel - qu’elle recevait un « énorme soutien » en-dehors des régions affectées. (Acadie Nouvelle) À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, disait Corneille.
Des décisions difficiles, règle générale, ça fait mal à tout le monde et c’est fait rapidement; ici bien au contraire on voit des cas où ces décisions gardent la forme d’une menace qu’on laisse planer au-dessus de groupes restreints dont, hasard quand tu nous tiens, le travail se mesure par le biais du service rendu plus que du profit généré.
Je parle d’éducation, je parle de soins hospitalier, je parle de travailleurs dans les foyers de soins, je parle des services communautaires, je parle de tout cela qui, aux yeux du gouvernement actuel du moins, « coûte trop cher » et ne rapporte pas suffisamment.
Sauf que se borner à couper ce qui coûte « trop cher », c’est encore une question de jugement et de priorités: qu’une chose ou un service soit considéré trop cher à la lumière des objectifs d’une personne, peut très bien n’avoir rien de problématique au regard d’une autre.
Ici on tombe dans des questions de perspective, de priorités, d’objectifs dont la pertinence et l’importance dépendent presque entièrement du pouvoir à la disposition de la personne ou du groupe qui les énonce. Le gouvernement Higgs, sans même chercher à s’en cacher la majorité du temps, est un gouvernement de chiffres qui valorise la majorité. Il calcule plus qu’il n’écoute pour résumer au plus simple.
On verra quels genres de détours ça peut lui faire prendre dans la seconde partie de ce texte. Dans le fond, même moi je ne suis pas à l’abri des coupures!
Aucune position officielle du C.A. de la FÉÉCUM ne devrait en être nécessairement interprétée.
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