
Par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets.
Avec sa nouvelle chef, le Nouveau parti démocratique du Nouveau-Brunswick (NPDNB) devrait tout de même avoir quelque chose de neuf à proposer. La plateforme du parti, intitulée « Plateforme 2018 » a été lancée le 10 septembre, ce qui doit nous permettre d’en juger (NPDNB). Peinant à se relever de ce qu’il convient d’appeler une reconstruction en profondeur, le parti semble s’être rallié derrière sa nouvelle chef, Jennifer McKenzie, et nous propose un ensemble d’engagements dans l’espoir d’un retour à l’Assemblée législative. Ce serait une première depuis le départ d’Elizabeth Weir en 2005.
On comprend ainsi mieux les raisons pour lesquelles la chef du Parti passe la majorité de sa campagne dans sa circonscription de Saint-Jean-Havre. Pour la chef, ce sera donc le siège avant le pouvoir, question de redorer le blason du Parti et, on peut le croire, affermir sa position de chef. Il s’agit justement de l’ancienne circonscription de Mme Weir, et les appuis au NPD semblent toujours bien vivants sur le terrain (Radio-Canada).
L’éducation postsecondaire y est entre autres abordée, où l’objectif du Parti est décrit comme étant de « réduire les barrières à l’éducation postsecondaire » (NPDNB). Il est proposé d’aborder cet enjeu par un nombre de mesures, qui seraient appliquées dès sa première année au pouvoir par un gouvernement NPD:
- Empêcher l’ajustement des droits de scolarité en 2019;
- Scolarité gratuite pour tous au CCNB/NBCC;
- Scolarité diminuée de 25% dans les universités publiques;
- Élimination de l’intérêt sur les prêts étudiants (existants et futurs);
- Augmenter l’aide financière pour les étudiant.e.s admissibles au DSG et au PADSCM;
- Nouveau programme de bourses pour les cycles supérieurs;
- Investir dans les services en santé mentale sur les campus;
- Mettre en place des politiques contre la violence sexuelle;
- Financer STU de façon équitable.
Bloquer l’ajustement des droits de scolarité prévu pour l’an prochain, ça signifie forcément renégocier les ententes de financement conclue avec les universités publiques par le gouvernement sortant. S’il est prévu d’imposer une baisse de 25% des droits de scolarité de surcroît, la chose semble inévitable. Répétons au besoin que les ententes signées en 2018 se résument au sous-financement planifié de nos universités et que ce seront les étudiant.e.s qui en feront inévitablement les frais.
Ces mêmes étudiant.e.s reçoivent aujourd’hui 20 M$ de moins en aide financière qu’en 2010, d’après les informations contenues dans la plateforme.
La scolarité gratuite au niveau des collèges communautaires semble un objectif réalisable au point de vue législatif. Comme le CCNB/NBCC est essentiellement une branche du gouvernement, Fredericton a certainement le pouvoir de faire ce que propose le NPD sans devoir trop faire de contorsions. Évidemment, reste à établir le coût.
Même chose quand il s’agit de financer STU de manière équitable - pour ce faire il faudra l’une de deux choses. Soit on amende la formule de financement qui accorde un poids (donc un financement) moins élevé aux étudiant.e.s dans les cours d’arts libéraux (les seuls offerts à STU), ou alors une entente séparée qui placerait les autres universités en position de renégocier leur propre entente en fonction des concessions faites à STU. Cela relancerait forcément le bal puisque l’injustice dénoncée serait perpétuée sous d’autres termes.
Investir davantage en santé mentale sur les campus va de soi - le gouvernement en a fait un objectif de sa nouvelle entente de financement, au niveau du financement d’initiatives.
Obliger les institutions à adopter des politiques sur la violence sexuelle, ce serait d’abord au niveau des collèges que ça ferait une différence, car les universités en ont toutes adoptées au cours des dernières années. Moncton, la dernière à suivre la parade, a lancé la sienne en décembre 2017 (UMoncton). En revanche, ça pourrait signifier plus de ressources pour les mettre en application.
L’élimination de l’intérêt sur les prêts étudiants, également proposé par le Parti vert, est réalisable dans notre contexte; en Nouvelle-Écosse, qui les a éliminés en 2014, le coût en était estimé à 16 millions$ par année pour 18 000 étudiants (Chronicle-Herald).
Quant au programme de bourses pour les cycles supérieur, et à rendre ces derniers admissibles au DSG et au PASDCM, reste à voir combien d’individus cela pourrait toucher; ça règlerait potentiellement la situation des étudiant.e.s en Droit, qui présentement ne sont pas admissibles. Rien n’est certain toutefois car il s’agit d’un second programme du premier cycle et pas d’un programme du 2e cycle.
À part des mesures présentées en éducation postsecondaire, le NPDNB propose d’autres initiatives dignes de mention:
- Réforme des garderies et des haltes scolaires (à un coût maximum de 15$ par jour);
- Salaire minimum à 15$/heure et réforme des lois sur le travail;
- Réforme des soins à domicile, incluant l’application de l’équité salariale et le retour de l’extramural et d’Ambulance NB dans le secteur public;
- Meilleures pratiques de protection des forêts et des océans;
- Investissement dans l’infrastructure verte et dans la recherche sur les technologies vertes.
- Amélioration des protections et des conditions en milieu de travail;
- Meilleur accès aux syndicats;
Bref, on pourrait s’y méprendre entre cette plateforme et celle du Parti vert, si ce n’était que celle du NPD se concentre plus fortement sur la condition ouvrière, est largement moins développée et que les engagements y sont non chiffrés pour la plupart. En même temps, les progressistes-conservateurs chiffrent encore moins leurs engagements alors on ne doit pas obligatoirement y voir un obstacle insurmontable. Peut-être qu’après les années Cardy à la tête du NPD, les militants en avaient marre d’entendre parler de chiffres?
Quoi qu’il en soit, l’espoir - et les efforts - du Parti se centrera d’abord sur l’élection de la chef dans sa circonscription; ça nous dit peut-être tout ce que nous avons besoin de savoir sur l’état du Parti et ses appuis dans la population ailleurs qu’à Saint-Jean.
Mais pour le moment, ce qu’il y a de neuf se limite à ça.
Aucune position officielle du C.A. de la FÉÉCUM ne devrait en être nécessairement interprétée.