
Par Raymond Blanchard, agent de recherche et projets.
Difficile de rester nouveau à long terme, il faut le concéder, mais le Nouveau Parti Démocratique du Nouveau-Brunswick (NPDNB) a quand même déployé l’effort de produire un semblant de plateforme. Peinant à se relever de ce qu’il convient d’appeler une reconstruction en profondeur, le parti semble prêt à se rallier derrière sa nouvelle chef, Jennifer McKenzie, et propose un ensemble d’engagements à l’électorat dans l’espoir de faire son retour à l’Assemblée législative. Ce serait une première depuis le départ d’Elizabeth Weir en 2005.
On comprend ainsi mieux les raisons pour lesquelles la chef du Parti compte passer la majorité de sa campagne dans sa circonscription de Saint-Jean Havre. Pour la chef, ce sera donc le siège avant le pouvoir, question de redorer le blason du Parti et, on peut le croire, préserver son statut. Il s’agit justement de l’ancienne circonscription de Mme Weir, donc les appuis au Parti sont en principe toujours vivants sur le terrain. (Radio-Canada)
Peut-être aussi trouve-t-on là la raison de l’absence du lancement d’une plateforme à proprement dire; en revanche, la section « nos engagements » du site web du Parti nous fournit les grandes lignes des intentions du NPD.
L’éducation postsecondaire y est entre autres abordée, où l’objectif du Parti est décrit comme étant de « réduire les barrières à l’éducation postsecondaire » (NPDNB). Il est proposé d’aborder cet enjeu par un nombre de mesures, qui seraient appliquées dès sa première année au pouvoir par un gouvernement NPD:
- Empêcher l’ajustement des droits de scolarité en 2019;
- Scolarité gratuite pour tous au CCNB/NBCC;
- Scolarité diminuée de 25% dans les universités publiques;
- Élimination de l’intérêt sur les prêts étudiants (existants et futurs);
- Augmenter l’aide financière pour les étudiant.e.s admissibles au DSG et au PADSCM;
- Nouveau programme de bourses pour les cycles supérieurs;
- Investir dans les services en santé mentale sur les campus;
- Mettre en place des politiques contre la violence sexuelle;
- Financer STU de façon équitable.
Bloquer l’ajustement des droits de scolarité prévu pour l’an prochain, ça signifie forcément renégocier les ententes de financement avec les universités publiques. S’il est prévu de leur imposer une baisse de 25% des droits de scolarité de surcroît, la chose semble dans tous les cas inévitable. Répétons au besoin que les ententes signées en 2018 sont pour l’essentiel des contrats de sous-financement planifié de nos universités et que ce seront les étudiant.e.s qui en feront inévitablement les frais.
La scolarité gratuite au niveau des collèges communautaires semble un objectif réalisable, bien qu’à un coût. Comme le CCNB/NBCC est essentiellement une structure gouvernementale, Fredericton a certainement le pouvoir de faire ce que propose le NPD sans devoir trop faire de contorsions. Mais là encore - à un coût indéfini.
L’énoncé de politique parle de 20 millions$ qui restent à être réinvestis en aide financière aux étudiant.e.s, qui est un départ même si ça semble bien peu considérant ce qu’il est proposé d’accomplir en éducation postsecondaire: il ne s’agit pas de réformes mineures.
Même chose quand il s’agit de financer STU de manière équitable - il faudrait pour ce faire l’une de deux choses. Soit on amende la formule de financement qui accorde un poids (donc un financement) moins élevé aux étudiant.e.s dans les cours d’arts libéraux (les seule offerts à STU), ou alors une entente séparée qui placerait les autres universités en position de renégocier leur propre entente en fonction des concessions faites à STU. Cela relancerait forcément le bal puisque l’injustice dénoncée serait perpétuée sous d’autres termes.
Investir davantage en santé mentale sur les campus va de soi - le gouvernement en a fait un objectif de sa nouvelle entente de financement, au niveau du financement d’initiatives.
Obliger les institutions à adopter des politiques sur la violence sexuelle, ce serait d’abord au niveau des collèges que ça ferait une différence, car les universités en ont toutes adoptées au cours des dernières années. Moncton, la dernière à suivre la parade, a lancé la sienne en décembre 2017 (UMoncton). En revanche, ça pourrait signifier plus de ressources pour les mettre en application.
L’élimination de l’intérêt sur les prêts étudiants, également proposé par le Parti vert, est réalisable dans notre contexte; en Nouvelle-Écosse, qui les a éliminés en 2014, le coût en est estimé à 16 millions$ par année pour 18 000 étudiants (Chronicle-Herald).
Quant au programme de bourses pour les cycles supérieur, et à rendre ces derniers admissibles au DSG et au PASDCM, reste à voir combien d’individus cela pourrait toucher; ça règlerait potentiellement la situation des étudiant.e.s en Droit, qui présentement ne sont pas admissibles. Rien n’est certain toutefois car il s’agit d’un second programme du premier cycle et pas d’un programme du 2e cycle.
À part des mesures présentées en éducation postsecondaire, le NPDNB propose d’autres initiatives dignes de mention:
- Réforme des garderies et des haltes scolaires (à un coût maximum de 15$ par jour);
- Salaire minimum a'15$/heure et réforme des lois sur le travail;
- Réforme des soins à domicile, incluant l’application de l’équité salariale et le retour de l’extramural et d’Ambulance NB dans le secteur public;
- Meilleures pratiques de protection des forêts et des océans;
- Investissement dans l’infrastructure verte et dans la recherche sur les technologies vertes.
- Bref, on pourrait s’y méprendre entre cette plateforme et celle du Parti vert, si ce n’était que celle du NPD est largement moins développée et pratiquement pas chiffrée. Les idées sont bonnes, on ne peut pas dire le contraire, mais pour être franc, l’impression qui s’en dégage est un manque de sérieux. Peut-être qu’après les années Cardy à la tête du NPDNB, les militants en avaient marre d’entendre parler de chiffres?
Quoi qu’il en soit, l’espoir - et la travail - du Parti se centre d’abord sur l’élection de la chef dans sa circonscription; ça nous dit peut-être tout ce que nous avons besoin de savoir sur l’état du Parti et ses appuis dans la population.
D’autres engagements viendront sûrement, par exemple ce matin la chef a annoncé l’intention d’ajouter 100 postes de professionnels en milieu scolaire, enseignant.e.s et autres (NPDNB) si le Parti est porté au pouvoir, et très peu d’éléments de la plateforme touchent à la santé, un enjeu qui ne peut être ignoré. Pour ce que nous intéresse, l’éducation postsecondaire, la plan a été dévoilé et sans être chiffré il est très clair.
Mais pour le moment, ce qu’il y a de neuf se limite à ça.
Aucune position officielle du C.A. de la FÉÉCUM ne devrait en être nécessairement interprétée.